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Histoire des Autochtones du Canada
Tome II (1 000 avant J.-C. à 500 après J.-C.)

Les Platéliens récents (Sommaire, Chapitre 27)

Le relief irrégulier du plateau canadien en Colombie-Britannique et les effets de son altitude sur la disponibilité saisonnière des plantes et des animaux ont imposé des contraintes aux chasseurs et cueilleurs mais ont aussi créé des opportunités. Région de plateaux et de montagnes au sud du 55° de latitude nord, le plateau canadien est situé entre les montagnes de la côte et les Montagnes Rocheuses et au nord des frontières canadiennes et états-uniennes (Holland 1964). À l'intérieur des ces limites, le fleuve Fraser et ses affluents représentent le principal bassin suivi de celui la rivière Columbia et celui de la rivière Skeena à la frontière nord. Une caractéristique impressionnante de ce relief est la tranchée des Montagnes Rocheuses qui s'étend de la frontière de la Colombie-Britannique avec le Montana au nord-ouest jusqu'à la rivière Liard dans les territoires du Nord-Ouest. La partie sud de la tranchée, longue de 725 km, consiste en une vallée ininterrompue, variant de 3 à 16 km de large, dans laquelle se trouve la source du système de drainage du fleuve Columbia, à faible distance de la source du fleuve Fraser. Les deux systèmes fluviaux accusent éventuellement un brusque virage vers le sud-ouest, qui fait que le fleuve Columbia se jette dans l'océan pacifique entre les États de Washington et l'Orégon alors que le fleuve Fraser rejoint l'océan pacifique à Vancouver. Pour la plus grande partie, le plateau canadien est recouvert d'une zone de végétation de la forêt Columbia-Montane, de climat froid et tempéré, caractérisée par l'épinette, le tremble, le pin, le cèdre, la ciguë, et le Douglas taxifolié. Les précipitations varient de 30 à 70 cm et les chutes de neige entre 75 à 500 cm. La température moyenne de janvier et juillet varie de -20 à -3 degrés C et de 10 à 21 degrés C, respectivement (McAndrews and Manville 1987). Les poissons anadromes, comme le saumon, qui fraient et passent leur étape juvénile dans les eaux douces et la grande partie de leur vie adulte dans la mer, remontaient autrefois jusqu'à la source du fleuve Columbia en Colombie-Britannique et se rendaient même aux lacs Windermere et Columbia, 60 km à peine à l'ouest de la frontière de l'Alberta. Cependant, des chutes d'eau empêchaient le saumon d'entrer dans la grande partie du système de drainage de la rivière Kootenay immédiatement à l'ouest du lac Kootenay. Dans cette partie de l'extrême sud-est du plateau canadien, le bison était disponible mais si le cerf-mulet, le cerf de Virginie, le caribou, le wapiti, la chèvre de montagne, le mouflon de montagne, l'ours noir et d'autres espèces de gibier étaient présents, leur distribution et densité connaissaient une grande variété selon les endroits (Banfield 1974).


Massue ou pilon - Dessin : David Laverie
Massue ou pilon zoomorphique du Platélien récent

Cet instrument en pierre polie du site Lehman situé au sud de Lillooet a pu servir de marteau dans l'industrie du bois en compagnie d'une herminette en pierre ou un coin en bois et/ou potentiellement pour le broyage des plantes et des viandes séchées. L'animal reproduit est probablement une grenouille ou un têtard stylisé, animal qui semble avoir revêtu une signification symbolique comme le serpent à sonnette dans les arts à trois dimensions des Platéliens récents.

(Reproduction, avec permission, de M. David Sanger, Département d'Anthropologie, Université du Maine à Orono, 1970 : Figure 32h. Dessin de M. David W. Laverie.)


Étant donné la complexité topographique et écologique, la variété des occasions et des limitations pour les chasseurs et les cueilleurs, il n'est pas surprenant que le régionalisme culturel caractérise cette région. Cependant, ce régionalisme n'était pas suffisant pour nier l'application de Platélien récent à la reconstitution culturelle de toute la région, sauf pour la région de Kootenay. La reconnaissance de la nature diversifiée de l'environnement du plateau canadien et son influence sur le régionalisme culturel ont conduit à l'opinion que "Une mosaïque de diverses cultures apparentées séparées par la chaîne de montagne ou les bassins peut être le seul modèle régional de longue durée" (Fladmark 1982 : 125). Les régions telles que Chilcotin, le Moyen-Fraser, la rivière Thompson, la rivière Tompson sud-les lacs Shuswap ouest, Nicola, l'Okanagan nord, les lacs Arrows (Ibid : 21) et, en particulier, Kootenay, exhibent vraiment des caractéristiques culturelles locales qui reflétent l'adaption régionale aux conditions locales. En dépit de cette affirmation, le plateau canadien est considéré comme partageant un modèle culturel généralement semblable. Ce modèle, appelé localement la tradition des "Maisons semi-souterraines du Plateau" (Plateau Pithouse tradition), est mieux connu depuis la région du moyen Fraser-rivière Thompson. La tradition a été divisée en trois horizons culturels qui débutent à la Période III, dure toute la Période IV, et se termine avec les parlants salishans historiques à la Période V. Un horizon culturel est considéré comme "...essentiellement un concept intégrant qui reconnaît que certaines différences régionales existent" (Richards and Rousseau 1987 : 41). La région de Kootenay est exclue de la tradition des "Maisons semi-souterraines du Plateau" par Richards et Rousseau mais cette exclusion peut être prématurée ou, au moins, requiert une qualification.

Le Platélien récent émergea directement du Platélien moyen précédent. Une fois de plus, une possible exception à cette généralisation est la région de Kootenay du sud-est de la Colombie-Britannique où le détail de l'enregistrement publié est limité, et le manque d'études archéologiques des deux villages connus de maisons semi-souterraines rendent difficile de déterminer à quel degré la région a participé au Platélien récent, au Planussien récent, aux deux cultures, ou était distinct en lui-même. Sur la base de l'enregistrement présent, on croit que la région a participé à un plus grand degré au Platélien récent qu'au Planussien récent à l'est. Plusieurs des traits observés en ethnographie dans les prairies du Haut-Kootenay étaient vraisemblablement des introductions récentes reliées à l'usage du cheval pour l'exploitation saisonnière du bison sur les pentes orientales des Montagnes Rocheuses (Blake 1981). Sauf pour le Kootenay, il y consensus sur le fait que les descendants des Platéliens récents étaient les bandes historiques de parlant salish du plateau canadien. Les Chilcotins, parlant l'Eyak-Athapaskan et les Porteurs au nord représentent des immigrants relativement récents dans le territoire au sud du 55° de latitude nord; le résultat de ce déplacement majeur de population vers le sud a probablement été relié à l'éruption volcanique de la rivière White et à la retombée des cendres au Yukon (Wright 1995 : Planche IX en noir et blanc, 145) qui est survenu vers 500 après J.-C. (Moodie et al. 1990).

Le Platélien récent peut se caractériser par : un mode d'établissement comprenant des villages sédentaires de maisons semi-souterraines en hiver dans les vallées et des camps temporaires en vue d'exploiter en saison chaude une grande variété de ressources durant la plus grande partie de l'année; l'entreposage de nourriture dans des fosses en vue de la consommation hivernale; l'usage de fosses servant de fours pour la cuisson; un usage intensif de pierres de chauffe pour la cuisson et pour étuver; une dépendance à l'égard du saumon pour la nourriture de consommation hivernale mais seulement comme un élément intégral d'un système où les racines entreposées et les baies et la viande de chevreuil, fraîche et fumée, revêtaient aussi une importance; une faible industrie de l'os; la domination de l'outillage en pierre taillée par rapport à la pierre polie; la présence de sculpture zoomorphique; et l'enregistrement de contacts dus à un commerce croissant avec les gens de la côte. La région de Kootenay correspond partiellement à ce modèle et son affiliation avec le Platélien récent est présentement fondée sur les éléments partagés de la technologie.

Les habitations creusées, qui apparurent d'abord au Platélien moyen à la Période III, étaient des structures semi-souterraines, généralement de contour circulaire comportant une entrée située, croit-on, au sommet d'un toit conique ou pyramidal à laquelle on accédait par une échelle de rondins. La profondeur de la fosse, les caractéristiques intérieures et extérieures pouvaient être très variables. La plupart des villages de maisons semi-souterraines remontent à environ 1 000 avant J.-C. à l'époque de la transition de la Période III à la Période IV. Le nombre croissant et la taille de ces villages sont significatifs et peuvent être attribués à une augmentation de la vie sédentaire avec ses exigences de grandes quantités de nourriture entreposée pour l'hiver, notamment de saumon séché, de la viande de chevreuil fumée, des champignons et des baies. On a proposé que, entre 4 000 avant J.-C. et 1 après J.-C., la nourriture entreposée constituait un supplément à la chasse du gibier mais que de 1 après J.-C. les rôles ont été inversés à savoir que la chasse au gibier constituait un complément aux poissons entreposés et aux plantes. Il semble maintenant que le rôle important de la nourriture entreposée pour l'hiver était bien en place à la Période IV et vraisemblablement longtemps avant. En fait, les villages de maisons semi-souterraines peuvent être moins le résultat d'une sophistication croissante dans les méthodes de conservation de la nourriture que la fusion pour l'hiver des populations antérieurement dispersées. Les raisons pour la fusion des populations en hiver sont plus vraisemblablement fondées sur le jeu complexe des facteurs sociaux, économiques et technologiques que sur tout autre facteur telles que les améliorations de l'entreposage de la nourriture.

La tradition des Maisons semi-souterraines du Plateau (Plateau Pithouse tradition) se caractérise par un mode d'établissement semi-sédentaire impliquant des villages de maisons semi-souterraines pour l'hiver, situés dans les vallées et se concentrant sur l'exploitation du saumon et l'entreposage de la nourriture pour l'hiver. Trois horizons séquentiels composent cette tradition, à savoir l'horizon Shuswap de 2 500 à 500 avant J.-C.; l'horizon du plateau de 500 avant J.-C. à 800 après J.-C.; et l'horizon Kamloops de 800 après J.-C. jusqu'à l'arrivée des Européens (Richards and Rousseau 1987) Remarquez que cet âge du calendrier est fondé sur la conversion des années de radiocarbone variant de 4 000 à 2 400 A.A., 2 400 à 1 200 A.A. et de 1 200 jusqu'à l'arrivée des Européens, selon Klein et al. (1982).

Les tendances technologiques durant la Période IV comprennent le remplacement des styles de pointes de projectile qui rappellent la séquence de McKeen/Duncan/Hanna des prairies par une variété de formes à encoches baso-latérales, à base encochée et pédonculée. En dépit des réclamations antérieures (Donahue 1975 : 39), l'arc et la flèche n'apparaissent pas sur le plateau canadien avant environ la fin de la Période IV (Fladmark 1986 : 131; Richards and Rousseau 1987; Stryd 1973). Un certain régionalisme est apparent avec des styles de pointes de projectile dans les régions de Okanagan et les lacs Arrow reflétant la proximité du plateau Columbia. Même si on a suggéré que les deux régions de Okanagan et lacs Arrow ont participé au modèle culturel du plateau Columbia (Turnbull 1977; Wilson 1980), il y a aussi un enregistrement qui appuie leur inclusion dans la tradition des Maisons semi-souterraines du Plateau (Richards and Rousseau 1987). La continuité culturelle à l'intérieur de la tradition constitue la prémisse d'un mode d'établissement et des changements technologiques relativement limités ou a été reliée au changement environnemental. Par exemple, les changements climatiques ont servi d'explication pour la transition de l'horizon de Shuswap en horizon du plateau (Richards and Rousseau 1987 : 52) en dépit de la nature plutôt mineure de ces changements. Une efficacité adaptative croissante, associée à une croissance et une consolidation de la population, est vraisemblablement le facteur le plus important qui a joué sur l'évolution du Platélien.

Vers le début de la Période IV ou 1 000 avant J.-C. "...le modèle culturel adaptatif de la tradition des Maisons semi-souterraines du Plateau était établi partout sur le plateau canadien" (Richards and Rousseau 1987 : 23) ainsi que sur le plateau de Columbia (Ames and Marshall 1980 : 35), même si le processus avait débuté dans les deux régions avant 2 000 avant J.-C. Le phénomène de ce mode d'établissement des villages hivernaux situés dans les vallées sur les plateaux canadien et de Columbia a été interprété comme le produit d'une sédentarité croissante, une complexité culturelle et l'intensification de l'importance des aliments entreposés pour la consommation hivernale (Ames and Marshall 1980). Les plus anciens villages de maisons semi-souterraines habitées toute l'année ont été localisées dans des centres stratégiques, riches en ressources. L'augmentation de la population avec le temps a de plus en plus requis une exploitation spécialisée efficace de certaines ressources (Lohse and Sammons-Lohse 1986). Certains ont argumenté que les techniques de pêche au saumon et les méthodes de conservation ont été cruciales aux processus alors que d'autres ont mis l'emphase sur l'importance de l'entreposage des racines et d'autres sources de nourriture d'origine végétale entreposée. Il y a un certain accord, cependant, sur le fait que les populations ont augmenté au cours de la Période IV (Fladmark 1986). Il est impossible à déterminer dans le moment jusqu'à quel point la croissance biologique naturelle a été responsable de cette impression de croissance de la population, par rapport aux populations qui, plus dispersées autrefois, se fusionnaient pour former des villages hivernaux.

On possède très peu de connaissances reliées à la cosmologie du Platélien récent. Les sépultures en position fléchie dans le plancher des maisons semi-souterraines ont été documentées. Des fragments d'os humains dans les foyers à l'extérieur des habitations suggèrent que la crémation était aussi pratiquée. Dans un cimetière près de Kamloops, les restes partiellement incinérés de quatre enfants étaient accompagnés de nombreuses offrandes mortuaires, notamment d'herminettes en néphrite polie, des manches de bâton à fouir en andouiller, des poids de filet, et des perles en coquillages marins de dentalium (Smith 1900 : 436). La majorité des bols en pierre sculptée et polie représentant des personnages humains en position assis qui surviennent dans le sud de la côte et sur le plateau canadien, remonte, croit-on, à environ 2 500 et 1 500 ans. Sauf quelques exceptions, ces ouvrages d'art élaborés ont été découverts accidentellement à des endroits généralement éloignés des villages suggérant que "ces objets ont pu avoir servi lors de rituels secrets" (Fladmark 1986 : 92). On a aussi spéculé sur le fait que les bols à effigie avaient servi "...de vases pour les rituels et les séances de divination de chamans et de ritualistes" (Duff 1975 : 52) et étaient donc "associés à la vénération de la vie; de ce point de vue, ils faisaient partie d'un art sacré" (Ibid : 52-53).

On peut à peine parler de la biologie humaine en raison de la rareté des restes de squelette et d'études publiées en anthropologie physique concernant le plateau canadien pour la Période IV. Une sépulture provenant de la région de Lillooet implique un homme qui a survécu à plusieurs coups de gourdin sur le côté de la tête et à une blessure causée par une pointe de projectile en pierre à l'avant-bras (Stryd 1980), témoignages de l'existence de conflits dans la région dès 500 avant J.-C. Cet individu avait été évidemment soigné jusqu'à la guérison de ses blessures.

Étant donné les obstacles que constituent les montagnes aux voyages, ainsi que la localisation du plateau canadien relativement à la côte ouest, aux prairies, au plateau de Columbia, et la partie septentrionale des Cordillères, les liens avec les groupes culturels avoisinants semblent avoir été plutôt variables. Alors qu'il y avait de nombreux contacts entre les gens de la région de Moyen-Fraser et de la rivière Thompson avec la côte, d'autres régions du plateau canadien contiennent peu d'enregistrement de contacts significatifs avec la côte. Le commerce de la stéatite (pierre à savon), des herminettes en néphrite, et le basalte de l'intérieur contre des perles en dentalium et d'autres objets en coquillages marins depuis la côte, doivent seulement représenter un faible reflet d'un commerce plus étendu de biens périssables, notamment du saumon séché depuis l'intérieur et d'huile d'eulakane depuis la côte. Le meilleur saumon séché venait de l'intérieur à cause des excellentes conditions locales de vent propre au séchage et du faible contenu en gras du saumon après avoir pénétré dans l'intérieur depuis la côte (Romanoff 1985 : 156). Le saumon devait éventuellement devenir la base économique du réseau de commerce côte-intérieur. En dépit des suggestions antérieures du contraire (Sanger 1967), il semble y avoir eu des contacts significatifs entre les plateaux canadien et de Columbia. Le partage du mode d'établissement de villages de maisons semi-souterraines pour l'hiver que permettait l'entreposage de la nourriture, ainsi que certains styles de pointes de projectile, notamment les pointes de javelot à encoches baso-latérales et à encoches basales, indiquent des liens susceptibles d'exister entre ces deux régions. Les derniers styles de pointes de projectile sont plus anciens sur le plateau de Columbia et dérivaient probablement de cette région. De la même façon, les plus anciennes maisons semi-souterraines dans le haut plateau de Columbia remontent à environ 3 000 avant J.-C. (Lohse and Sammons-Lohse 1986) alors que la plus ancienne apparition de ces structures distinctes sur le plateau canadien remontent à approximativement 1 000 ans plus tard, ce qui indique une diffusion probable depuis le sud vers le nord. Les contacts avec les Planussiens récents sont aussi apparents, particulièrement au début de la Période IV. Les perles en coquillages Dentalium et Olivella contemporaines avec celles des sites des Planussiens récents représentent un autre indice de commerce entre les deux groupes culturels. Les contacts avec le nord, notamment le commerce de l'obsidienne du Mount Edziza depuis la tête des eaux de la rivière Skeena, semblent avoir été limités (Wright and Carlson 1987). La pénétration par les parlant eyak-athapaskan des anciens territoires des Platéliens récents au sud du 55° latitude nord n'est pas survenue avant le début de la Période V (500 après J.-C.). Les liens de la région de la haute région de Kootenay dans le sud-est de la Colombie-Britannique avec les Platéliens récents ou les Planussiens récents ne peuvent pas être adéquatement mesurés en ce moment. Les villages de maisons semi-souterraines, quoique rares, ont été découverts dans la région (Borden 1956) mais leur profondeur temporelle n'a pas été déterminée. Le chert et l'argilite du sud-est de la Colombie-Britannique sont cependant communs sur quelques sites du piémont de l'Alberta (e.g. Driver 1993 : Figures 4 et 5).

Les sociétés des Platéliens récents consistaient en plusieurs familles individuelles regroupées en bandes locales comportant un réseau de parents qui s'étendait par les mariages entre individus de bandes diverses. Il est probable, comme l'ont décrit les observateurs européens, que quelques bandes se fusionnaient temporairement pour former un village commun en hiver. On a proposé que les sociétés hiérarchiques se développèrent à cette époque, comme l'indiquent la taille variable des maisons semi-souterraines individuelles en hiver et d'autres indices de l'enregistrement (Hayden et al. 1985). D'un autre côté, le contenu des maisons, grandes ou petites, fournit généralement un enregistrement peu convaincant de la distribution biaisée de biens de luxe en faveur des grandes habitations en dépit des prétentions du contraire (Hayden and Spafford 1993). Cependant, les plus grandes maisons semi-souterraines de la Période III et de la Période IV dans la région du Moyen-Fraser et de la rivière Thompson indiquent un modèle socio-économique plus complexe (Pokotylo and Froese 1983 : 152). Il existe des indices que des groupes corporatifs différents ont occupé des habitations spécifiques sur une base continue pendant au moins 1 000 ans. Ces différents groupes corporatifs à l'intérieur de la même communauté exploitaient les ressources minérales de différentes régions, ce qui indiquait la propriété de ces régions riches en ressources par des groupes spécifiques de familles dans la société (Hayden et al. 1996). Cependant, la propriété des ressources n'est pas nécessairement un indice de sociétés hiérarchisées et pourrait être simplement l'expression de droits traditionnels de groupes individuels corporatifs et de famille composant la société. Aussi, les grandes maisons semi-souterraines auraient pu avoir été les maisons des chefs locaux ou les chefs de différentes bandes dans des villages d'hiver comprenant plusieurs bandes qui attiraient un grand nombre de membres résidentiels. Les grandes habitations auraient pu avoir été requises pour accommoder les cérémonies hivernales comme celles dont parlent les documents historiques parmi les Lillooet. Les différences dans la taille des habitations parmi les autres groupes corporatifs comme chez les Iroquois, par exemple, n'étaient pas des indices d'une hiérarchie dans la société en soi, ni n'étaient le fait de certains lignages claniques et des segments pouvaient exercer un contrôle sur des régions spécifiques de ressources. On a spéculé que les systèmes sociaux observés historiquement, notamment les chefs héréditaires, la propriété privée des ressources et le contrôle du commerce, pouvaient remonter à il y a 2 000 ans dans la région de Lillooet (Hayden and Ryder 1991 : 54) mais seulement le seconde spéculation a été démontrée par l'enregistrement archéologique. On ressent le besoin de déterminer pourquoi quelques-uns des grands villages de maison semi-souterraines semblent avoir été occupés pour seulement une courte période de temps, notamment au site de Kamloops Reserve (Wilson 1972), alors que d'autres ont été occupés sans interruption pendant plus de 1 000 ans, notamment le site de Keatly Creek (Hayden and Spafford 1993), ou pourquoi la partie du site Kamloops Reserve qui a survécu aux pelles mécaniques était caractérisée par des maisons semi-souterraines de taille uniforme et, dans cette perspective, différait de façon significative du mode d'établissement du site Keatly Creek. Il y a aussi le problème de la nature des toits des plus grandes maisons. La disposition des marques de pieux (e.g. Hayden and Spafford 1993 : Figure 10) en fournit peu d'indices et il est donc possible que de telles habitations n'aient pas eu, contrairement à la période ethnographique, un toit en forme de dôme comportant une entrée qu'on atteignait grâce à une échelle en rondins.

Les limites de l'enregistrement relié au Platélien récent en général ont été, pour reconstituer l'histoire culturelle, de se fier de façon presque totale aux fouilles de maisons semi-souterraines comportant généralement des dépôts culturels mélangés. Cependant, quelques fouilles ont révélé des maisons d'une seule occupation et même des villages (Wilson 1972) et, par conséquent, une histoire culturelle fiable semble avoir été élaborée en dépit des problèmes du mélange des composants dus à la ré-utilisation des maisons et la multiple occupation des endroits propices à l'érection de villages. Il y a vraisemblablement un degré de sous-représentation des plus vieux segments des villages hivernaux dans les vallées dus à l'érosion (Richards and Rousseau 1987 : 54). Ce n'est que récemment qu'on a concentré l'attention sur d'autres sites que les villages hivernaux au profit des campements aux dépôts minces, de température chaude exploitant une variété de ressources notamment les racines et les baies (Pokotylo 1981). La destruction des sites due à l'exploitation des terres, particulièrement la création des réservoirs hydro-électriques qui ont inondé des vallées entières, ont constitué une autre cause importante de limitation à l'enregistrement. Le vandalisme est un problème grave dans certaines régions comme Kamloops. Un problème moins évident se trouve dans la publication des documents archéologiques et de leur disponibilité. Dans la plus récente synthèse de l'archéologie du plateau canadien (Richards and Rousseau 1987), 37% des 214 ouvrages cités correspondent à des manuscrits non publiés, à des thèses, et à des communications présentées lors de réunions.


 
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